J'ai 2 idées à vous proposer
Vous allez pouvoir voter pour la "philosophie design" de notre preuve de concept
Temps de lecture : 14 minutes.
Ce rapport hebdomadaire est destiné aux 216 pionniers.
Salut à tous,
Depuis que nous avons été invités à Monte-Carlo, un compte à rebours s’est déclenché.
Un compte à rebours dont le tic tac assourdissant pourrait rappeler l’affreux supplice de la goutte d’eau. Une sordide mais ingénieuse idée qui a fait perdre la raison à plus d’un prisonnier grâce à la simple chute régulière d’une goutte d’eau sur le front du malheureux.
Mais à l’inverse des pauvres diables qui ont subi la torture médiévale, nous ne sommes pas pieds et mains liés.
À l’inverse, nous sommes en pleine possession de nos moyens pour soulever les montagnes qui se mettront sur notre chemin.
Il faut dire que la date du rallye Monte-Carlo est idéale.
Elle est dans précisément 2 mois. Ce qui nous laisse le temps de monter les derniers éléments mécaniques de notre preuve de concept, de concevoir ses habillages, et de lancer leur fabrication.
Le compte à rebours qui s’est enclenché la semaine dernière est donc un compte à rebours de 2 mois. Dans 2 mois, nous allons pouvoir présenter au grand public — et pour la première fois — le résultat de 3 ans de conception.
Ça sera l’occasion d’enfin montrer notre preuve de concept finalisée, mais surtout le cœur battant de ce véhicule : le groupe motopropulseur que nous avons conçu.
Mais pour ça, nous allons devoir polir notre message.
Il devra être ciselé avec tact, pour réussir notre première impression. Car nous le savons bien, nous n’avons qu’une seule chance de faire une bonne première impression.
Alors nous travaillons à l’élaboration de notre message, qui se compose grossièrement en 2 composantes :
Le contenu du message (donc notre argumentaire) ;
Et le contenant du message (donc tout ce qui l’entoure).
Aujourd’hui, le contenu est notre point fort.
Voilà bientôt 3 ans que nous écrivons, semaine après semaine, notre aventure.
Tout le contenu de notre message se trouve dans les articles que j’ai publié et les rapports que je vous ai envoyés. Si bien qu’aujourd’hui, nous nous sentons capables de rassembler en un argumentaire très serré toutes les composantes de notre projet.
En revanche, pour ce qui est du contenant, nous sommes en retard.
Je ne dirai pas que nous sommes aux abois, mais l’enrobage communicationnel nous a toujours paru secondaire jusqu’ici.
Nous sommes avant tout des concepteurs. Le design de notre preuve de concept, les supports de communication, les éléments de langage : voilà autant de sujets que nous avons mis en second plan, pour nous concentrer sur le fonctionnel.
Mais cet état de fait ne pourra pas se perpétuer indéfiniment.
Car à Monte-Carlo, c’est d’abord aux yeux que nous allons devoir nous adresser. Quand je parle d’un compte à rebours, c’est donc sur l’élaboration d’un contenant désirable que ce compte à rebours aura prise.
À commencer par le design de notre preuve de concept qui, à l’heure où j’écris ces lignes, est pour le moins minimaliste.
Ce que nous avons déjà fait
Parmi vous, quelques-uns se sont inquiétés à juste titre de notre capacité à tenir nos engagements.
Si je dis que c’est “à juste titre”, ce n’est pas pour me contredire avec ce que j’ai affirmé plus haut (du point nommé de la date du rallye Monte-Carlo). Je suis trop amateur de syllogismes élégants pour me laisser aller à un tel revers logique.
Non, je dis que votre inquiétude est juste, compte-tenu de ce que vous savez.
Il faut bien reconnaître que depuis quelques mois, la preuve de concept a été passée sous silence pour concentrer nos efforts sur les approvisionnements critiques en modules de batteries et en moteurs électriques, afin de solidifier notre modèle industriel.
En conséquence, vous n’entendez plus parler depuis quelques mois de notre preuve de concept. La dernière information que vous avez pu vous glisser sous la dent date du 10 septembre 2023, quand je vous avais appris avec joie que notre groupe motopropulseur était enfin fonctionnel.
Mais depuis, vous n’avez plus reçu aucun signe de vie.
Soit 2 mois et 16 jours d’un électrocardiogramme plat. La conclusion qu’il est permis de tirer de ça, c’est qu’au cours de ces 11 semaines de mutisme, la preuve de concept n’a connu aucune évolution.
C’est une conclusion autorisée puisqu’en absence de preuve, la preuve de l’absence est souvent constatée.
Hélas, ce n’est pas le cas.
Car ce que j’ai omis de préciser au cours de ces 77 jours d’interruption, c’est que n’a pas arrêté de s’y consacrer.
Et pour cause : son rôle, depuis son arrivée, c’est de faire fonctionner cette preuve de concept afin de valider la pertinence de notre groupe motopropulseur.
Il s’adonne donc à améliorer constamment notre calculateur central (il a développé la 2ème version du code initialement installé) ;
Il débugue les multiples pannes logicielles qu’il débusque sur notre groupe motopropulseur ;
Et il s’occupe même de monter les organes périphériques de la moto comme les systèmes de freinage.
La preuve de concept, donc, avance en silence.
Et puisque Clément en dicte le tempo, je dois bien suivre le rythme.
J’ai donc conçu toutes les pièces mécaniques qui manquaient pour la faire rouler, et elles sont aujourd’hui soit dans notre atelier, soit en cours de fabrication.
Si bien que dans quelques semaines (à mi-décembre selon toute vraisemblance), notre preuve de concept sera prête à faire ses premiers tours de roue. Et à ce moment-là, elle ressemblera à ça :
Une moto nue, équipée uniquement du groupe motopropulseur que nous avons conçu (et qui est devenu notre cœur de métier), et qui aura la capacité de rouler férocement sur tous les circuits de France.
Cette moto, c’est un premier prototype fonctionnel.
Très abouti, il nous permettra de tester toutes les hypothèses que nous avons faites lors de notre phase de développement, et il enrichira la conception de notre groupe motopropulseur plateformisé.
C’est donc une moto d’ingénierie.
En l’état, elle a toute sa place sur un circuit ou dans un bureau d’études.
Le problème, c’est que cette moto, nous allons aussi devoir nous en servir pour démontrer que nous avons su concevoir un groupe motopropulseur très performant (et que nous ne sommes pas que des créateurs prolifiques de contenu).
Cette moto doit donc devenir notre porte-étendard. Et elle doit le devenir en l’espace de 2 mois.
Ce qu’il nous reste à faire
C’est à ce stade que votre aide va faire basculer la ligne temporelle que nous emprunterons.
Car si ce qu’il reste à faire est assez évident, je vois néanmoins 2 manières de le faire. 2 manières très différentes, qui ont chacune leur potentiel, et qui soulignent individuellement un axe de notre projet.
D’abord, l’évidence : ce qu’il reste à faire, c’est l’habillage.
Notre preuve de concept n’est pas directement présentable, telle qu’elle. Elle doit se couvrir d’habillages en tous genres, qui la rendront crédibles en tant que moto électrique prête à dévorer du bitume.
Ces habillages sont pluriels :
Il faut prévoir un cache-batterie, sur le dessus de la moto, pour protéger les cuisses des personnes qui l’enfourcheront ;
Il faut intégrer des garde-boue à l’avant et à l’arrière de la moto, pour envoyer le message que cette moto a bien été conçue par des gens qui connaissent l’importance de se protéger des projections ;
Il faut installer des phares à l’avant et des feux à l’arrière, pour finir la silhouette de la moto ;
Il faut prévoir des rétroviseurs, pour s’acquitter de l’obligation légale de donner une vision arrière aux motocyclistes ;
Et il faut ajouter un sabot à notre groupe motopropulseur, pour offrir une courbure plus douce au dessous de notre preuve de concept.
Tous ces éléments sont plus ou moins évidents à installer et à choisir.
En détails, les éléments 2, 3 et 4 que j’ai cités me semblent relativement simples à trouver. Ils sont disponibles sur étagère, et ne demandent rien d’autre qu’un arbitrage esthétique suivi d’une commande sur n’importe quel bon site commerçant.
Les éléments qui sont moins évidents sont donc le premier et le dernier de cette liste : les 2 carénages sur-mesure que nous allons devoir concevoir, puis fabriquer dans un délai très court.
Le délai est si court que pour se donner toutes les chances d’arriver à bon port (je parle ici de l’hôtel Port Palace à Monaco), j’estime que nous devrons avoir terminé la conception des carénages dans une semaine pour lancer la fabrication dans la foulée.
Et c’est là qu’interviennent les 2 manières que j’ai évoquées plus haut.
Car pour avoir terminé cette conception à temps, nous devons trancher aussi vite que possible la philosophie de ces carénages. Nous devons nous fixer sur le message qu’ils doivent faire passer, ce qui découlera d’une conception qui sera tout sauf aléatoire.
Les 2 manières que j’aimerais vous présenter ici — et entre lesquelles nous allons devoir trancher — sont donc 2 philosophies distinctes, exprimées par 2 esthétiques distinctes, et donc 2 formes distinctes de carénages.
Tranchons vite, agissons bien
La première manière m’a été suggérée lorsque j’étais à Flins, chez Renault.
Pendant la journée que j’y ai passée, j’ai eu une discussion informelle avec un designer industriel qui s’est pris d’intérêt pour notre projet. Et alors que je lui expliquais que nous avions besoin de déclencher un épisode de grande visibilité, il a eu une idée.
Il m’a en effet conté l’histoire d’Ora-ïto, un designer français (comme son nom l’indique si bien) qui a lancé sa carrière sur une campagne qui a fait beaucoup de bruit. Une campagne au cours de laquelle il s’est amusé à redessiner des bouteilles de bière.
Dit ainsi, on se demande comment une carrière peut démarrer sur un tel projet.
Et c’est là qu’il s’est démarqué : il ne s’est pas contenté de dessiner des bouteilles de bière, il a dessiné des bouteilles de bière Heineken, la marque de bières la plus connue dans l’hexagone.
Il a, tout à fait indépendamment de la marque Alsacienne, publié son interprétation de ce à quoi devait ressembler une bouteille métallique Heineken. Et la suite est entrée dans l’Histoire, puisqu’il est aujourd’hui mondialement connu.
L’idée proposée par le designer que j’ai croisé chez Renault, c’est de s’en inspirer.
Le principe serait de présenter notre preuve de concept comme une interprétation de la première moto électrique Renault. Mieux, ça serait la première moto Renault tout court — puisqu'à ma connaissance, Renault n’a produit qu’un scooter dans sa longue vie. Aucune moto.
Amusé par cette idée qui a le mérite d’attirer l’attention, j’ai entamé dans la foulée une étude des gimmicks design de Renault. Je n’en ai pas trouvé mille, puisque la marque au losange n’est pas exactement réputée pour son audace stylistique.
En résumé :
J’ai identifié les 2 couleurs iconiques (le jaune banane/mangue et le bleu Alpine qui semble néanmoins disparaître) ;
J’ai aussi perçu une crainte des formes abruptes (c’est simple, il n’y a quasiment jamais aucun angle saillant dans une Renault) ;
Et j’ai distingué une tendance profonde vers un retour aux sources (Alpine, R5, Twingo).
Ces 3 points se retrouvent largement dans la R5 électrique, l’une des dernières voitures électriques qui a été annoncée par Renault. Elle fait du neuf avec du vieux, elle exècre les angles, et elle est couverte de jaune.
À la suite de cette rapide analyse, j’ai dégainé l’arme de l’intelligence artificielle.
Car oui : pour se faire une idée rapidement de la pertinence d’une idée, les chantres des algorithmes de large language model et de stable diffusion ont inventé des outils d’aide à la création désarmants d’efficacité.
L’un d’entre eux s’appelle Vizcom, est accessible gratuitement (je vous invite à vous y amuser), et permet de produire en quelques minutes des images qui valident ou invalident n’importe quelle idée de design.
Je lui ai donc demandé, en aiguisant mon “prompt engineering”, une moto Renault sur la base de notre preuve de concept aujourd’hui dénudée.
Et voilà ce qu’il a su me produire, afin de guider notre décision (même s’il reste encore trop d’angles) :
Voilà donc pour la première idée que je vous propose.
Elle consiste à dessiner les carénages de notre preuve de concept pour inventer la première interprétation d’une “moto Renault”. C’est une idée nécessairement jaune, qui souligne notre lien avec Renault, mais qui masque notre groupe motopropulseur.
Ce qui m’amène à la deuxième idée.
Cette idée, je l’ai eue cette semaine en montant le rideau métallique de notre atelier. Pendant le moment suspendu qui consiste à attendre que le rideau métallique atteigne son sommet, mon regard s’est posé sur cette preuve de concept.
À peu de choses près, elle ressemblait à ce que vous pouvez voir dans cette vidéo :
Et c’est en regardant distraitement cette moto à moitié finie que j’ai ressenti un regret.
J’ai en effet pensé que finalement, je la trouvais assez belle comme ça. Que les vues 3D que j’avais réalisées jusqu’à présent sur notre logiciel ne lui rendaient pas grâce, mais que dans la réalité, elle avait beaucoup plus de prestance.
J’ai alors conclu qu’il serait dommage de cacher tout ce travail que nous avons produit sous un carénage jaune opaque.
Et je me suis rappelé un visuel marquant que j’avais vu passer il y a bien longtemps, d’une moto aux carénages transparents.
Je me souviens de l’effet que cette moto avait eu sur moi.
Une sorte de résonance longue, de l’impression d’avoir vu un objet en dehors du temps. Étonnamment, cette moto m’avait procuré une sensation d’apaisement agréable, comme une glace à la pistache (la vraie pistache) dégustée devant la baie de Saint-Jean-de-Luz.
Forcément, j’ai pensé qu’il y avait quelque chose à faire de ce souvenir.
Car un carénage transparent qui laisse apparaître notre groupe motopropulseur d’aluminium et ses câbles bien rangés, ça a le potentiel de marquer les esprits. En tout cas, c’est mon intuition.
Note : propose même d’aller plus loin dans cette philosophie, en se passant entièrement de carénages.
Son idée, ce n’est pas de présenter un “produit fini”, mais une moto qui raconte chaque étape de sa propre conception en dévoilant ses parties les plus intimes. Une moto qui met l’accent sur la transparence en somme, à l’image de ce projet tout entier.
Vous me direz ce que vous pensez de cette proposition également — c’est une des options envisageables de cette 2e idée !
Passons aux votes
Voilà un rapport hebdomadaire extrêmement long.
Alors ici, je vous propose qu’on soit efficaces pour ne pas peser plus sur votre repos dominical. Et le mieux pour en venir aux faits, c’est d’en venir aux votes.
En guise de préambule, je précise que je vous consulte pour avoir vos retours sur la meilleure esthétique de carénages — ou plutôt, sur la meilleure philosophie à adopter. Considérez donc que tout ce qui concerne la fabricabilité de ces carénages est validé.
Et puisque le temps est compté, sachez que dès demain, la voie à suivre sera choisie.
Je vous invite donc à voter juste en dessous, en choisissant l’une des 2 idées de carénages entre lesquelles je suis partagé :
Évidemment, je vous encourage aussi à me faire vos retours en commentaires de ce rapport hebdomadaire. Vous pourrez ainsi défendre votre avis, et partager votre enthousiasme (s’il y en a) !
Comme vous l’imaginez, j’ai hâte d’avoir vos retours.
Alors dans l’attente impatiente de vous lire, je vous souhaite un très bon dimanche. J’espère vous lire nombreux !
Julien
J'aurais voté la transparence également d'un point de vue maintenabilité pour voir l'état a travers les carénages sans devoir démonter , par contre on verra plus la crasse a moin de faire des garde boue jaune tous en laissant apparaitre notre joli motopropulseur 🤔
Bonsoir à tous,
Je vote trop tard et ne participe quasiment jamais… réduisant ma participation à ma modeste contribution financière…
Bref:
J’aurais également voté pour le carénage transparent qui, par rapport à un naked brut, a l’avantage de donner envie de comprendre ce qu’il y a dessous.
Un peu comme de la lingerie.
Il faut émoustiller le chaland. Qu’il entre dans une démarche de compréhension.
En revanche, il pourrait être intéressant de placarder derrière l’objet quelques posters montrant des interprétations / mises en situations imaginées pour que le visiteur se projette.
Voilà, bonne nuit!